les débuts de l'intérêt pour les guitares vintage (français!

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Benja23
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les débuts de l'intérêt pour les guitares vintage (français!

Message par Benja23 »

Lettre de G. Gruhn à propos des débuts de l’intérêt pour les instruments « vintage ». Je l’ai traduite de son site www.gruhn.com

C’est un fait évident que le prix des instruments vintage sont incroyablement plus élevés qu’ils ne l’étaient au milieu des années 60 lorsque j’ai commencé ma collection. Par contre, il était en fait beaucoup plus difficile de trouver des instruments vintage à cette époque que maintenant. A notre époque, il y a des centaines, voire des milliers de magasin de musique qui mettent des annonces pour des instruments vintage dans les magazines spécialisés et sur internet. A l’époque, il n’y avait pas un seul magazine ou livre sur le sujet et très peu de magasins voyaient le potentiel de ces instruments. Lorsque j’étais étudiant à l’université de Chicago, je lisais les petites annonces dans le journal, les annonces dans le journal de l’école et j’allais dans tous les magasins de musique de la région. Vraiment à cette époque, les instruments vintage étaient difficiles à trouver. Il y avaient beaucoup plus de vieux instruments oubliés dans les armoires, dans les caves et les greniers des gens. Il y avait donc peu d’instruments vintage puisqu’ils n’étaient pas visibles.

A cette époque, mon meilleur endroit pour trouver des vieux instruments était un magasin près du campus de mon université appelé : « The Fret Shop » tenu par un gars excentrique nommé Pete Leibunguth. Même si Pete n’était pas très callé en histoire des vieux instruments, il était très efficace pour trouver des beaux instruments d’avant guerre. Il a fait de nombreuses heures de route pour trouver des vieux groupes de musiciens, rencontrer ces vieux musiciens ou leur famille qui pourraient encore avoir des vieilles guitares, vieux banjos et vieilles mandolines. Le magasin « the fret shop » et de nombreux membres du « University of Chicago Folklore Society » m’ont servi d’introduction dans le monde des instruments vintage. A cette époque, de tels magasins étaient très rares et loin les uns des autres (Jon Lundberg en Californie et « fretted instruments » in greenwich village). Le seul autre magasin ayant des vieux instruments à l’époque était « the Denver Folklore Center ».


En cette période, les quelques magasins ayant des vieux instruments étaient intéressés uniquement par les instruments acoustiques. Personne ne s’intéressera aux électriques vintage avant de nombreuses années. Je me souviens encore avoir acheté une Stratocaster de 1957 custom noire en parfait état dans un petit magasin d’objets divers d’occasion à quelques centaines de mètres de mon université. Je l’ai payée 75 dollars et je ne trouvais personne intéressé par une Stratocaster. Cet instrument vaudrait maintenant une petite fortune. A cette époque, non seulement les guitares électriques vintage n’intéressaient personne, mais les Stratocaster n’étaient pas recherchées. Il y avait beaucoup plus de demande pour les « Jazzmasters », les « Jaguars », les « Mosrites ».
Le prix des guitares acoustiques et électriques vintage était donc ridiculement bas, mais ces guitares étaient difficiles à trouver et une fois trouvées, il était difficile de les revendre avec un bon profit. Ce n’est certainemetn pas un business qui m’aurait rendu riche à cette époque. Avec le recul, il aurait été génial d’acheter tout ce qu’on pouvait trouver et garder tous ces instruments pendant 40 ans. A l’époque, il n’y avait aucun moyen de prédire que les prix allaient grimper de façon si vertigineuse.

Il ne m’était pas possible de trouver assez d’instruments dans la région de Chicago pour satisfaire ma soif de vintage. Pendant mes vacances d’été 1965, j’ai décidé d’aller à Nashville pour voir ce qu’y s’y passait. J’avais entendu tellement d’histoires disant que Nashville était la ville de la musique aux USA. J’étais certain que tous les magasins de Nashville seraient remplis de guitares vintage. Lorsque je suis arrivé à Nashville, ce fut un choc. Il n’y avait pratiquement aucun instrument vintage à vendre. Je me suis arrêté au magasin de guitare « Hank Snow » et j’y ai trouvé un professeur de guitare qui possédait une Gibson L-12 de 1930, mais elle n’était pas à vendre. Le magasin « show bud guitars » avait de nombreux « pedal steel » (Benja : instrument à cordes horizontal avec lequel on joue au bottle neck) qu’ils fabriquaient, mais les quelques instruments vintage qu’ils avaient étaient réparés par leur « service réparation ». Ils étaient si mal réparés que ces instruments étaient inutiles pour les collectionneurs. Ils revernissaient les guitares de telle façon qu’on aurait cru qu’ils les avait trempés directement dans le vernis.
Je suis passé chez « Hewgleys music » et c’était le dealer exclusif Gibson à Nashville. Ils vendaient les guitares au prix officiel (Benja : aux USA les grandes marques donnent un prix de référence et les magasins font les réductions qu’ils veulent. Pour les guitares Martin, il est possible d’obtenir jusqu’à -40% du prix officiel). Monsieur Stone, propriétaire du magasin considérait certainement le mot « discount » (réduction) un gros mot de la langue anglaise. Aujourd’hui, ces trois magasins ne sont plus en activité, mais à l’époque ils étaient les trois grands magasins dominants de Nashville.

Je n’ai donc pas fait d’achat intéressant à Nashville. J’étais prêt à rentrer chez moi directement, très déçu, lorsque j’ai eu la chance de rencontrer Jim Broadus, qui travaillait chez « Hewgleys guitars ». Il m’a parlé d’un homme à Chatanooga qui collectionnait les vieilles Gibsons et les vieilles Martin. Son nom était Mike Longworth. Jim avait la carte de Mike Longworth derrière le comptoir et il me donna son numéro de téléphone. J’ai tenté de l’appeler mais personne ne répondit. Puisque je n’avais rien d’autre à faire et que j’avais du temps devant moi, je me suis dit que ça valait peut-être la peine d’aller jusque là en voiture et de voir s’il ne serait pas là le soir. A cette période, Mike Longworth dirigeait une plantation de cacahuètes comme job de jour et il collectionnait les guitares vintage et faisait du travail d’incrustation à côté. En 1968, il entra chez Martin pour faire leurs travaux d’incrustation de perles. Peu de temps après avoir été engagé, il est devenu le responsable de la communication avec les clients. Ensuite Mike Longworth écrivit le premier livre définitif sur l’histoire des guitares Martin. Mike est resté un grand ami de chez Martin après qu’il ait pris sa retraite et se soit installé dans le Tennessee. Il est mort récemment et il nous manque beaucoup.

Jim m’indiqua comment aller chez Longworth et me dit que ça prendrait 4 heures. Aujourd’hui, avec les nationales modernes, ça ne prend que deux heures. Lorsque je suis arrivé à Chatanooga, j’ai appelé chez Mike et c’est sa femme qui a répondu et elle m’a dit que Mike était à un festival de guitare à Asheville, en Caroline du nord. Le festival avait lieu tous les étés, premières semaine d’août depuis des années. Suzan la femme de Mike m’a proposé de passer chez eux voir la collection de son mari. Il avait des fabuleuses Martin « Herringbone » de la série 28 ainsi que des guitares Martin de la série 42 et 45, des guitares que je n’avais jamais vues avant. J’ai demandé à Suzan combien de temps il me faudrait pour aller à Asheville. Elle m’informa qu’il me faudrait 4 heures par des petites routes de montagne. Aujourd’hui, il est beaucoup plus simple de voyager en voiture, mais à cette époque j’avais l’impression que partout où j’allais il fallait 4 heures de petites routes de montagne. Je suis arrivé à 2 heures du matin et je me suis rendu compte que les musiciens jouaient encore sur le parking.

Pour moi, ce fut une révélation. Non seulement j’ai rencontré Mike, mais j’ai également rencontré de nombreux guitaristes de bluegrass et de nombreux guitaristes « âgés » avec des instruments magnifiques. Il y avait des banjos d’avant guerre, des mandolines Gibson, modèles A et F et de nombreuses vieilles Martin et vieilles Gibson. J’avais l’impression d’être arrivé au paradis. Le festival s’est poursuivi pendant trois jours et j’ai rencontré de nombreuses personnes qui font encore affaire avec moi aujourd’hui. C’est à Asheville que j’ai rencontré Tut Taylor qui devint mon associé lorsque j’ai ouvert mon magasin en 1970. Lors de ce festival, on m’informa qu’il y avait un autre festival à Galax, en Virginie. On m’a informé que c’était à 4 heures de route de Asheville. Le festival de Galax a été aussi bon que celui de Asheville. Non seulement la musique était bonne, mais en plus une bonne partie des musiciens avaient n’avaient pas seulement l’instrument qu’il utilisaient, mais également des instruments à vendre dans le coffre de leur voiture.

Les festivals de Asheville et de Galax changèrent ma vie. L’été suivant, je suis allé à de nombreux festivals et j’étais déjà un « dealer » actif. Je n’avais aucune idée que je finirais gérant d’un magasin de guitares. Je pensais vraiment finir mes études par un doctorat sur le comportement des animaux et que les mandolines, les banjos et les guitares resteraient un hobby.

En 1968, j’étais un étudiant qui travaillait sur le comportement des animaux dans le département de psychologie de l’université de Tennessee lorsqu’un jour, je reçus un coup de téléphone de Hank Williams Jr. Il me dit qu’il avait eu mon numéro de téléphone par Sonny Osborn. Je connaissais Sonny grâce à mes visites aux festivals de bluegrass. Sonny avait dit à Hank que j’avais plein de vieilles Martin. Il voulait donc me rencontrer pour voir ce que j’avais. Il m’a dit qu’il pourrait être à Knoxville (ville de mon université) dans 4 heures. Il semble que le chiffre 4 était le chiffre magique à cette époque. Il m’acheta toutes les guitares que son coffre pouvait contenir (3) et me dit qu’il serait de retour le lendemain avec un véhicule plus grand. Le lendemain, il arriva avec sa cadillac et acheta toutes les guitares que la voiture pouvait contenir. J’en avais encore plein. Il me dit que Nashville n’avait personne comme moi et que je devais m’y installer. Il me dit que si je voulais venir, il me fournirait un appartement et qu’il m’aiderait à monter un magasin d’instruments de musique. Ca me paraissait être une bonne idée. J’aimais beaucoup étudier le comportement des vipères et leur manière de se nourrir, il était assez évident que je vivrais pas confortablement en faisant ça. Mais encore maintenant, si vous avez un serpent qui ne veut pas manger, je pourrais encore vous aider.

J’ai arrêté l’université et je suis parti à Ashville où l’appartement de Hank m’attendait. Nous n’avons jamais créé de magasin ensemble, mais pendant ma première année d’activité, j’allais chez Hank plusieurs fois par semaine. Il était un si bon client que c’est lui qui m’aida à vivre du début 1969 jusqu’en 1970 lorsque j’ai ouvert mon magasin avec comme associé Tut Taylor et Randy Wood comme employé pour les réparations. Nous avons ouvert notre magasin juste après le nouvel an 1970. Le nom original était « GTR » pour George, Tut et Randy (et une bonne abréviation pour guitare). Tut a été mon associé pendant 9 mois et Randy pendant 3 ans.

Désormais, ma vie est plus stable. Je ne suis plus prêt à partir sur un coup de tête pour 4 heures de route. Pourtant, chaque jour est une aventure. Je ne sais jamais qui peut entrer dans mon magasin et quels instruments je peux « rencontrer ». J’aime toujours autant les bons instruments. J’aime penser que nous avons une agence d’adoption pour guitares. Nous trouvons de nombreux instruments qui ont été maltraités pendant des années et nous en prenons soin, nous leur rendons vie et nous leur trouvons une bonne maison. Aujourd’hui, les prix élevés font que les marges bénéficiaires peuvent être importantes. Lorsque j’ai commencé, il était difficile d’en vivre. Je me souviens encore que quand nous avons ouvert, nous avions une magnifique D28 herringbone de 1938 au prix de 800 dollars et une D28 de 1946 pour 600 dollars. Elles étaient difficiles à vendre. Je me souviens également d’une Gibson ES 335 en parfait état que nous avons vendue 400 dollars. Evidemment, les prix d’aujourd’hui sont beaucoup plus élevés mais le fait est que les instruments de maintenant ne sont pas aussi bons que ceux de cette époque. J’adorais ces instruments à cette époque et je les aime toujours.

G. Gruhn
headsup
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Message par headsup »

merci pour la traduction. ça va plus vite et ça fait moins mal à la tête.
Benja23
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Message par Benja23 »

De rien! Faudrait que je fasse ça plus souvent lorsque c'est vraiment intéressant.

Benja
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