John Mayall

un coup de coeur, un ami... n'hésitez pas à nous faire part de bons talents...

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Remi Preuller
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John Mayall

Message par Remi Preuller »

Snif !
C'est au tour du vieux guru du British Blues de tomber dans le trou :(
A ce rythme, ce n'est plus une rubrique "Découvrir" mais une rubrique "Nécrologie"...

Je l'avais découvert avec le coffret double vinyle "Diary of a band", quelle claque !

Bref, toutes mes idoles de jeunesse me quittent et me laissent toujours davantage sentir la souffle de la faux !

Comme chantait Gainsbourg "Quant à moi... quant à moi je ne me sens plus très bien !"
bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

(ex) doublon (désolé) :wink:
Dernière modification par bernie le sam. 27 juil. 2024, 09:39, modifié 1 fois.
bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

90 balais quand même, ça laisse de la marge...Mais c'est vrai que les pionniers d'un genre que j'aime encore (et qui n'a pas tellement d'héritiers au niveau on dirait), ne sont plus légion.
L'invention, la fantaisie, l'engagement s'éclipsent, au profit d'un conformisme se sachant savant, ou s'y croyant parvenu...On n'a jamais si bien mal joué :mrgreen:

Le bon rock a vécu semble t il ; vive le bruit, la fureur, le rodéo etc., (mais là où je n'y suis pas...).
C'est bon ça laisse de la place pour bien faire (en essayant d'être positif :? )...

Salut vieux frère, on te voyait plus beaucoup sur la route, mais c'était chouette de penser que peut-être tu repasserais par là. Un pionnier s'est fait la malle, mais y'aura du monde pour l'attendre là où il va souhaitons-le... https://www.youtube.com/watch?v=UzmqxTBaNyI
Avec un p'tit jeune qu'on aurait presque oublié, pour une interprétation assez réussie d'Albert King www.youtube.com/watch?v=kzk0g36MFeo
Remi Preuller
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Re: John Mayall

Message par Remi Preuller »

Oublier Mick Taylor :?: :!: :?: :o
Le meilleur guitariste de blues que le youké ait produit depuis, peut-être, Peter Green ?
Impossible :wink:
bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

Remi Preuller a écrit : jeu. 25 juil. 2024, 13:22 Oublier Mick Taylor :?: :!: :?: :o
Le meilleur guitariste de blues que le youké ait produit depuis, peut-être, Peter Green ?
Impossible :wink:
Toi non manifestement, mais tous ceux qui sont nés depuis qu'il n'est plus Rolling Stone n'ont probablement jamais eu l'opportunité de l'entendre (si ses parents ne sont pas branchés Rolling Stones au moins)...
J'ai pas l'impression qu'il ait réussi beaucoup de choses en solo, et perso à part sur le net parfois, je n'en entends jamais parler. Même Jack Lang (sorry George, Lang...), notre ministre du rock qui aime passer un peu de blues parfois (Clapton, Gary Moore, SRV ou Joe Bonamassa, voire BB King parce qu'il a bossé ave U2) n'en pipe jamais mot...
Mais content de voir que tu sembles apprécier que je l'ai mis au passage...
Remi Preuller
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Re: John Mayall

Message par Remi Preuller »

Oui, j'apprécie beaucoup Mick Taylor et depuis AVANT les Stones justement depuis John Mayall ;)
Je n'ai plus le vinyle de Diary Of a Band mais j'ai toujours "Blues from Laurel Canyon" où le jeune Mick Taylor (19ans à l'époque) est déjà foutrement bon !
Et la période Mick Taylor reste, selon moi, la meilleure des Stones, surtout en live (Get yer Yaya's out) où il a davantage de place pour s'exprimer et montrer que c'est un vrai grand !
Son solo déchirant sur Wild Horses, par exemple (mais tous ses soli sur ce live) !!!
C'est vrai qu'il n'a pas percé après les Stones mais il avait bien plongé dans les drogues dures avant de refaire surface, enfin de surnager plutôt, ça n'aide pas :(
Pourtant son talent est intact mais la mode...
Et je le vois mal faire du hip-hop ou de ce qu'on ose appeler maintenant R'n'B :lol:
bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

Il était passé à Montpellier il y a quelque chose comme 10 ou 11 ans plus à peu près, dans le cadre des Internationales de la Guitare (à l'Opéra Comédie quand même) : j'avais eu envie d'y aller mais les vidéos de présentation le montraient dans un blues un peu trop tranquille et aplliqué avec un petit slide en verre...Presqu'accadémique/appliqué, et je n'avais pas été tellement séduit.

T'as pas dégotté un bon duo Mayall-Clapton sur le Net ?
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Re: John Mayall

Message par bernie »

niko
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Re: John Mayall

Message par niko »

bernie a écrit : jeu. 25 juil. 2024, 20:19 T'as pas dégotté un bon duo Mayall-Clapton sur le Net ?
Celui là est pas trop mal :
John Mayall Feat. Eric Clapton - All Your Love
https://youtu.be/RJ_vJbQw5ow?si=KigY9snOZfuFyrCu

Sinon vous avez vu la video que Clapton a postée hier et où il rend un touchant hommage à J.Mayall :
https://youtu.be/9cujG_O4KA4?si=ygWsnJF9DLffjJsX
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Re: John Mayall

Message par bernie »

Merci Niko, mais j'aurais aimé trouver un bon moment de l'époque initiale (ici c'est plus Clapton/Mayall que Mayall à l'époque où un Clapton inconnu jouait avec lui). Il y a des disques, ou des vidéos avec le son, mais pas l'image... Dommage.
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remi
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Re: John Mayall

Message par remi »

Billet écrit par Pier Mayer Dantec

A John MAYALL, pour son voyage en éternité,
et A Nelly P., pour cette passion partagée

Évocation d’un géant du blues, John Mayall
entremêlé d’une
Petite histoire d’un admirateur assoiffé et un peu perché

Ce soir, me voilà de nouveau en deuil, après la disparition de David Crosby, voici qu’un de mes héros majeurs de jeunesse s’en est allé. Oh ! je le craignais depuis un moment, vu combien les années l’avaient marqué, mais le voir jouer avec tant d’inébranlable joie me donnait confiance. Et ainsi jouait la balance de l’espoir et de la crainte.
Enfin, c’est comme ça : à 90 ans passés ‒ il était né le 29 novembre 1933 à Macclesfield près de Manchester, je le cite encore de mémoire ‒ John MAYALL nous laisse avec 75 bonnes années à jouer ce blues qui l’a nourri, lui qui commença très jeune à collectionner les disques de ses bluesmen favoris, de J.B Lenoir à qui il écrivit cette chanson dédicace, refusant sa mort et proclamant : « I’m gonna fight for you, J.B, your passing made so many cry... » à Sonny Boy Williamson, John Lee Hooker, en passant par toutes les grandes figures du Chicago blues, Otis Rush, Albert King, par exemple, sans mentionner toutes les autres formes de blues depuis l’origine.
Qu’on me pardonne si j’en viens à parler de moi plus que de lui, je ne suis pas son biographe, mais ma mémoire est si pleine et se sent si jeune en pensant à lui, et je me revois encore ramenant fier mon premier vinyle, le premier de toute ma vie, j’avais entre 18 et 19 ans, et tout sourire pour ma compagne, je l’arborais, impatient de l’écouter, de l’écouter avec elle.
« Regarde ! » lui dis-je, ému comme un enfant avec son premier jouet. Et là, je lui montrai la pochette :

JOHN MAYALL
THRU
THE
YEARS

Ce disque, comment en étais-je arrivé à l’acheter, à le choisir entre d’autres, je ne m’en souviens pas. J’ai acheté bien des vinyles, juste mû par l’intuition. Je n’en ai pas regretté jamais, d’ailleurs ils m’apprenaient de moi, quand je ne les aimais que peu. Et puis je suis un intuitif, pas un cérébral. Ce dont je me souviens par contre, c’est de la première fois où j’entendis le mot blues, entre 15 et 16 ans, et je ne savais rien de ce que ça voulait dire, vivant dans une famille où la musique ne trouvait aucune place, mis à part la musique classique que mon père écoutait religieusement le dimanche. L’émission était animée par un certain Michel Lancelot, sur Europe 1, et ce qu’il raconta du blues ce jour-là me marqua suffisamment pour que ce mystérieux nom de blues se pare à mes yeux de tant de bienfaits, ceux-là même que j’espérais. Il semblait passer par là quelque magie capable de zébrer le malheur, de faire entrer une lumière dans la pénombre des vies tristes, dont la mienne d’adolescent frustré, incompris, inécouté, ne rêvant que musique, amours et amitié, musique de mon temps, pleine d’énergie, de rébellion jusqu’à la fureur, mais de douceur aussi, enfin susceptible de toutes les modulations que l’âme cordiale ‒ ou le cœur animé ‒ ressent dans ses fibres…

Les années passèrent donc, mornes, je n’avais aucun disque, j’écoutais cette émission sur un de ces vieux Teppaz dont le haut-parleur était inclus dans le couvercle car il s’ouvrait comme une valise. A l’intérieur, une petite platine permettait de poser un 45 tours, elle était trop étroite pour un 33 tours. Et un bouton permettait de chercher les ondes des stations de radio. Si j’évoque ce détail, c’est pour bien faire comprendre à ceux qui liront ce texte quelle pouvait être mon allégresse en ramenant ce disque comme un trophée. Un vrai 33 tours.
On a regardé la pochette, ma compagne et moi. Je crois que je la léchais du regard, cette pochette. Et là, quelque cinquante ans plus tard, je l’ai posée devant moi, au-dessus de mon bureau : de profil, cheveux longs tirés sur le côté par une raie et tenus en catogan, yeux clos inspirés, bouche chanteuse, chemise d’un bleu délicat : John MAYALL avec sa guitare, modèle unique qu’il a fait fabriquer. Elle est étonnante, en forme de poire, avec sa tête telle une crosse, à elle seule elle attire l’attention. Qui sait si le rêveur que je suis encore n’avait pas acheté le disque pour ça ! En plus, elle est texturée, avec un effet puzzle : voilà qui ajoutait au mystère, pour le jeune que j’étais.
Bref, on l’a écouté alors. Ma compagne et moi avions acheté une petite chaîne Dual, et c’était déjà beau. Des petits baffles à grilles de plastique, s’élevait un chant qui m’emplissait, des guitares, un harmonica, un orgue, ça sentait l’échappée belle et le parfum du renouveau pour moi qui étais censé étudier… la médecine dont je me contrefoutais, qui me faisait souffrir. C’était jouer que je voulais, chanter la vie, la hurler s’il le fallait, comme Howlin’ Wolf. Comme Elmore James ou Jimmy Rushing, comme tous les bâillonnés de la terre, à qui des maîtres la font manger…

Ce disque, c’était en fait une compilation, le titre était assez évocateur. John Mayall Thru The Years. Les titres courent sur quatre ans, de mars 1964 au 30 avril 1968. Donc s’y distinguent certains des meilleurs instrumentistes de l’époque, dont les guitaristes Peter Green et Mick Taylor, l’incroyable batteur Aynsley Dunbar qui jouera avec Zappa bien plus tard, et le bassiste John McVie, avec qui Peter Green fondera Fleetwood Mac première mouture, la seule dédiée au blues, soit dit en passant.
Mayall avait déjà ce don : s’entourer des meilleurs, qui n’étaient pas encore connus. Tous travailleront avec lui par la suite. C’est peu dire qu’ils les a fait découvrir, à commencer par Eric Clapton. Et si beaucoup sont partis, virés comme le batteur Keef Hartley qui montera son propre groupe de blues, ce n’est jamais par cruauté. Bien sûr, certains en ont souffert, Hartley enregistra même plus tard un morceau : le téléphone sonne, il décroche : c’est la voix de Mayall, lui annonçant : « Hi Keef, it’s John. You’re sacked. »
Aynsley Dunbar quant à lui nomma son groupe « Aynsley Dunbar Retaliation », c’est dire. Les représailles d’Aynsley Dunbar, c’est original, un terme vengeur pour séduire, non ?! Mais voilà : Mayall était un visionnaire, il savait ce qu’il voulait, et ce n’était pas se répéter, ressasser avec les mêmes. Il se savait en chemin, se devinait en quête de son Graal, il cherchait un son, une voix. C’était un artiste, pas uniquement bluesman entre les bluesmen anglais, perdu en Angleterre, comme exilé de naissance par rapport au pays de son rêve : les Etats Unis, terre du blues originel, enfin, si on oublie l’Afrique…

Alors nul ne peut lui enlever ce titre de Father du British Blues que la presse britannique lui colla, oubliant au passage (mis à part certains journalistes connoisseurs) qu’avant lui un certain Alexis Korner, jouant dans les caves enfumées de Londres, avait commencé à œuvrer pour faire entrer cette musique dans un London qui n’était pas encore swinging. Et les Stones en particulier qui vinrent le voir à diverses reprises, vinrent aussi écouter Mayall dans ces mêmes caves. Un sacré bonhomme, Alexis Korner, ignoré ou oublié, chanteur à la voix rauque et très bon guitariste. Mais passons, il est bientôt deux heures du matin, et je ne raconterai pas toute l’histoire du British Blues.
Mayall, je dois le dire, était un artiste. Il peignit même la pochette de son troisième vinyle, « A Hard Road », et celle de « Blues From Laurel Canyon », mieux que bien.
Les pochettes, justement, parlons-en. Il a toujours pris soin de les soigner, en supervisant la production. Une mise en page complexe souvent. Il faut dire qu’il avait fait fait les Beaux-Arts, en était sorti diplômé, et ce n’est pas un détail futile : autre couleur sur sa palette, artiste complet, exigeant, intransigeant, et pour cela pas facile toujours, selon certains… dont il s’était séparé. J’y reviendrai.

C’était un pionnier aussi parce qu’il a innové, jusqu’à oser jouer en quatuor sans batteur, et qu’on me dise si ça avait déjà été fait : le somptueux « The Turning Point » en est la preuve vivante. Lui, le maître accompagné d’un guitariste acoustic finger style, Jon Mark, jouant sur une guitare classique, (vous avez bien lu !), Johnny Almond au saxo ténor, à l’alto et à la flûte traversière, et à la basse, Steven Thompson. Mark se sert de sa guitare avec assez de percussion, Mayall en rythmique déjà appuie le tempo avec charme et précision, et la basse apporte cette assise rythmique décisive : un must que ce disque, plein d’envolées de sax (« So Hard to Share ») ou arrosé de tranquille ballade :« California ». Oh ! Ce sax qui s’enroule et serpente, et grimpe jusqu’à une impossible cime, qu’il gravit palier par palier, avant de s’y reposer un temps… pour repartir smer ses notes. Johnny Almond, que j’aime autant que Charlie Parker, un seul morceau me suffit.

Quant à Mayall, c’était un incroyable poly-instrumentiste, et c’est pour ça qu’il a pu innover, en plus de cet appel secret qui devait l’inciter à quitter les imitations des bluesmen originels. A quoi bon essayer de chanter comme ceux dont la chair noire vibre au plus profond remuant les souvenirs d’une peine immémoriale ! Alors mieux vaut dévier, chercher d’autres pistes. Et pour ça, autant jouer de plusieurs cordes. Qu’on s’imagine un peu : chant, guitare, piano, orgue, harmonica. Il alla ainsi jusqu’à sortir un disque au nom évocateur : « The Blues Alone », où il joue de tous les instruments, sauf la batterie confiée à Keef Hartley.
Et puis, ce n’est pas tout. Il aurait pu se contenter de reprises, ce qu’il fait en partie à ses débuts, mais non : il fallait qu’il compose. Et là encore, aussi vrai que le blues se pare habituellement de nostalgie, ce cri funeste et orageux, il le tourna parfois en joie, comme dans le sublime album « Blues from Laurel Canyon », où il affiche sa joie tranquille, lui l’Anglais, de se retrouver enfin aux USA, à Los Angeles, enfin au pays père du blues, et là-bas pas n’importe où, mais à Laurel Canyon, qu’il arpente et chante en contemplatif comblé. Fini le temps de la plainte, voici venu le doux soleil et les flâneries entre les verdures. Ce quartier, c’est celui des musiciens, et j’imagine le voisinage. Il y remerciera d’ailleurs Canned Heat et Bob « The Bear »Hite pour leur accueil chaleureux.
Donc voilà un artiste, poly-instrumentiste on ne peut plus doué. Pour avoir essayé de jouer certains de ses morceaux, je peux le dire : Mayall : harmoniciste inimitable (« Room To Move »), et pas seulement : sa façon d’aller chercher les quarts de ton et de vous enfiler tout ça fluide, dans des mélodies parfaitement composées, ça laisse rêveur. Admiratif, plus de cinquante-cinq ans après la sortie de l’album.
Pianiste, capable de vous soulever les hanches au rythme du boogie-woogie. Et faisant un clin d’œil à l’histoire des barrelhouses sur un piano bastringue, ce clavecin des Noirs.
Organiste à la fluidité mariée au swing, sur l’orgue Hammond, cette bête géniale semblant aspirer les notes comme avec une langue géante et ramassée.
Guitariste, plutôt rythmique, et bien convaincant, avec un son à lui, une manière. Ses accords, il trouve parfois la façon de les tenir à la limite des arpèges, et puis voilà que d’un coup, oui, il se met à arpéger, mais alors comme en griffant les cordes : écoutez « So Hard to Share » dans le disque « The Turning Point », et vous comprendrez. Pizzicati sur guitare éléctrique...
Sur ce titre, il montre un sens inné de la syncope. Le rythme, il le rend vibrant, et mouvant.
Dans cet album, justement, sa guitare se colore d’une autre teinte. Un bottleneck caresse les cordes et installe une atmosphère planante : « Saw Mill Gulch Road » louche vers la West-Coast. C’est naturel : on y est.
L’harmonica, il le fait chuinter, en fait un train à vapeur. Ou bien comme dans « Room to Move », il le mord, mais sensuellement, charnellement, comme si la bouche tâtait un organe.
La basse, sur The Blues Alone, il la joue, certes simplement, plutôt dans les mediums, sans chercher de fioritures, mais elle est bien en place. Un challenge de plus accompli.
Et le chant : Mayall a une voix qui monte et se perche, une raucité nasillarde. Mais jamais il ne chante en voix en voix de tête. Elle n’a pas la puissance d’une voix noire, ni celle d’un Van Morrison, mais elle se pose, et , si elle ne vous ensorcelle pas, elle vous prend, et vous retient. Et elle module suffisamment entre les différents titres. De suave, presque murmurante, à quasi écorchée, elle vit.
Et elle vit si fort, que, emportée par un harmonica avec elle partage le souffle, voilà qu’elle se met à jouer des sons, et un scat sorcier se lève et danse, comme un conciliabule de crickets avant la fête . C’est ça, Room to Move. Ainsi, Mayall était un sorcier. Un scatter masqué.

De ce premier achat inaugural donc, tout est parti. A l’époque, j’avais une mémoire tellement gourmande que j’étais capable de citer aux disquaires les références de certains albums que je recherchais. Détail futile mais révélateur de ma passion.
Ce choix n’était pas un accident : puisqu’il y avait du personnel si différent, c’était l’occasion de remonter la filière. Celle des auteurs des chansons aussi bien sûr, ces bluesmen si illustres, Robert Johnson, et tant d’autres. Et dans mon cerveau commençait à s’écrire la liste des bluesmen américains.
Alors je suis remonté dans l’arbre du temps. J’ai débuté avec Peter Green’s Fleetwood Mac, le si fabuleux Peter Green qui chante tellement profond en modulant son blues velouté sur quelques titres de l’album John Mayall Thru The Years, en ajoutant à sa guitare déjà experte cet harmonica plaintif qu’il continuera à faire pleuroter avec Fleetwood Mac, jusqu’au sanglot syncopé, mais si bien alimenté en souffle.
Je repense encore à ce reproche qui a été fait à Mayall par certains journalistes rock d’agir en homme dur, inflexible sur ses décisions. C’est oublier la place qu’il a offerte aux Clapton, Peter Green et autres. A Clapton, qu’il embauche pour son deuxième album avec les Bluesbreakers après le départ de Green, Clapton qui voudrait chanter et ne l’ose pas, trouvant sa voix médiocre sinon laide, Mayall répond : Chante, tu verras. Lance-toi. Et ainsi ouvre une porte qui ne se refermera pas. Pour le plaisir de bien des admirateurs et de tous les fans de celui qu’on surnommera God et, par ironie, Slowhand.
Oublier aussi, j’y reviens, qu’il savait ce qu’il devait faire. Il était plus âgé qu’eux, plus mûr. Il sortait des Beaux-Arts et c’est à trente ans seulement qu’il décida de foncer dans cet univers du blues. Donc pas de temps à perdre à tergiverser.

J’ai commencé à parler de cette remontée vers les origines. J’ignore ce qui serait advenu sans ma rencontre avec Mayall, sans l’achat de ce 33 tours qui me tentait et me tendait les bras. Ce que je peux dire par contre, c’est que tout en commençant à suivre de près tout ce qui se faisait en Angleterre à l’époque, je me mis à remonter aux sources du blues. Chemin semé de rencontres incroyables, dont une que je raconterai un autre jour, de découvertes, c’était une chasse aux trésors, et il va sans dire qu’au lieu de traîner mes guêtres sur les bancs éteints de la fac, je passais d’un magasin de disques d’occasion à un disquaire plus classique, inlassablement, enregistrant les noms en mémoire passionnelle, achetant un disque parce que soit je connaissais le musicien en question, soit il faisait partie de ceux que je recherchais, soit je flairais la découverte, et c’est arrivé souvent.
Combien de fois suis-je rentré dans la chambre que nous partagions ma belle et moi avec sous le bras non pas un disque, mais deux ou plus. Et je l’avoue, pour suivre ma filière, j’ai renoncé à manger autre chose que simple baguette, et je m’en fichais : ce qui faisait vie, c’était ce blues... enfin, la musique, le folk, le rock, la pop… Je n’étais pas monomaniaque.
Au bout d’un moment, j’en ai connu cinq cents, des bluesmen. Répertoriés même, tel un scribe, sur un carnet que j’ai retrouvé dans mes archives. Mais de mon premier amour, jamais je ne me suis détourné. Et aujourd’hui je mesure la chance que nous autres amoureux du blues, du rock, du rythm’n’ blues et du jazz, nous avons eu de voir apparaître sur la scène mondiale depuis la triste Albion pour une fois pas perfide, ce grand gaillard chevelu à la silhouette légèrement voûtée, aux longs doigts fins et à l’élégance toute personnelle, même si s’y nichaient pas mal de traits hippie.
Que j’en aie été fan, oui, je l’avoue, au point d’en arriver à guetter la sortie du prochain de ses disques et de l’acheter sans l’écouter. Je ne raconterai pas certains détails de cette admiration mimétique, qui feraient sourire le lecteur généreux et peut-être moquer le sarcastique.
Et puis si tiens, justement, puisque m’y encourage mon grand ami Alain Chatignon. Voilà :
J’ai dit que j’en jouais, souvent, je chantais tous les jours, n’avais que musique en tête, dévorais Rock’n Folk, revue à laquelle je m’étais abonné, et qui fut ma Bible salvatrice. Dans ma chambre d’étudiant, une guitare, entre les numéros, étalés sur un couvre-lit. Au mur, en posters, les grands, The Doors, Hendrix, Santana, CSN&Y, tous, tous… Mais ceux-là, jamais je n’aurais osé les jouer, oh ! vous heureux jeunots avec les tutos qui fleurissent, savourez !
Or du Mayall, lui, j’en jouais. J’ai même acheté un piano pour ça. Et m’y suis collé, à l’oreille, à tâtons, à plaquer quelques accords.
Mayall était entré en moi. Alors un jour, je suis allé chez le coiffeur, j’avais des cheveux longs et raides, plats comme une limande malade. J’entre, me pose sur le siège, attendant mon tour.
Et le coiffeur vient vers moi : « Alors, comment vous les voulez ? »
De mon aisselle, je sors une photo : Mayall avec ses cheveux mi-longs, ondulants en boucles douces.
« Je veux ça ! », et je lui tends la photo.
Il a eu un petit sourire : « C’est la première fois qu’on me demande une chose comme ça ! »
Il m’a fait une belle mise en plis, une soigneuse permanente. Elle a tenu trois mois. Trois mois de cette espèce de féerie qui prend quiconque se refait un visage, juste pour élargir la vie.
Je laisse le lecteur libre de dire que j’étais comme une groupie. J’en étais une, et après ! Oui, mais une qui joue, et ose. Et par-là se sort du piège que la midinette ne voit pas venir.
Pour moi, Mayall restait un phare dans les brumes de mon existence, pousser le mimétisme à ses limites n’était que logique. Je l’ai fait jusqu’aux ongles et n’en ressens aucune honte. J’allais sur mes dix-neuf ans, et j’étais fait pour la passion. Ce n’est pas elle qui fait mourir, ni de rire ni de honte, c’est l’ennui poisseux de l’existence.

Au passage, j’en profite pour dire à tous ceux qui, bien plus jeunes que moi, fantasment sur ces années de mid 60’s aux 70’s, qu’à cette époque, il fallait aller en concert, que la télé ne diffusait rien ou presque. Sauf une émission que je ne ratais jamais, produite par un certain Patrice Blanc-Francard, et qui s’appelait Pop 2. Je quittais ma chambre et me précipitais vers une salle de la cité universitaire Budos, la seule où une télé attendait qu’on la sorte de sa noirceur grise, et lui permette de diffuser cette émission. Je m’y retrouvais toujours seul, je n’ai jamais compris pourquoi, c’était tristik cette petite salle muette, j’aurais bien voulu y voir des mordus de mon genre, mais qu’importe, ça ne m’a jamais empêché de littéralement déguster chaque émission, où je retrouvais toujours un de mes héros. Car il n’y avait pas que le blues pour moi non plus, je l’ai dit : le folk et le rock, la pop, le country, le bluegrass, le flamenco, le jazz manouche et la musique des Balkans, certain jazz aussi, ces musiques me chaviraient le cœur et me chauffaient les fibres.
C’est dans cette salle qu’un jour je regardai, émerveillé et tout sourire, Big Joe Williams jouer de sa guitare à neuf cordes, et l’écoutai raconter comment il l’avait bricolée. C’était ça aussi, le blues, dès le début, jouer avec une corde tendue sur un caisson, une boite de conserve, n’importe quoi capable de faire résonner. Washboard et corde sur manche à balai, n’est-ce pas Hendrix ?, ou de nos jours trois cordes sur une pelle, comme j’ai vu le faire un Américain ayant tout compris de cet esprit, et passé virtuose sur cet instrument, qu’il a lui-même fabriqué, et amplifié !

Enfin c’était ça, la passion, trouver des heures loin de la fac, de la routine bourgeoise, de cette putréfaction de la vie. Elle était si rude, pour ça, malgré la jeunesse, ma tendre compagne et mes amis.
Il y avait les concerts, ceux du Hot Club de Jazz, qui couraient sur l’année. Bordeaux était une ville très active pour cette musique. Et si j’ai dû en manquer certains, c’est que je n’étais pas là. Car je me revois encore dans cette salle aux fauteuils de velours rouge applaudir à tout rompre et donner de la voix, et souvent mes mains chauffaient encore alors que d’autres avaient rabattu les leurs. La passion, qui nourrit et peut-être dévore, tant elle est gourmande et insatiable, et c’est tant mieux. La froideur n’est pas pour moi.

Mais je ne parle plus que d’elle, et de moi, de ce qu’elle m’a fait faire. Vous ai-je dit que sans autorisation, je montai deux fois sur scène avec mes harmonicas, l’une d’elle avec Luther Allison, une autre, catastrophique, avec The Aces : je n’avais pas de retour, puisque je bondissais sans crier gare et, n’ayant pas l’oreille absolue, je choisissais l’harmonica diatonique qui me semblait convenir. Avec Luther Allison, ça s’était bien passé, mais avec The Aces : un désastre. Je voyais bien que ça n’allait pas, et je fouillais dans ma ceinture pour tirer un autre harmonica,mais ce n’était pas encore le bon, et puis comment le savoir, sans retour, l’oreille tendue pour essayer de trouver la bonne tonalité ?!
A la fin de la chanson, j’ai tout arrêté bien sûr. Mais je revois encore les yeux roulants de colère de Fred Below, le batteur, et sa voix qui me cinglait : « Man, you fucked my show, what’ d’d ya do !!!! You’re crazy. Man !! you Ffucked my show... » Et je crois qu’à sa colère se mêlait une dose de chagrin.
Des décennies après, je peux en rire mais je sens encore la gêne, jusqu’à la honte. Comme quoi l’audace ne suffit pas.
Les concerts sont un moment sacré. Toute scène est sacrée. Elle se mérite. Y grimper à l’abordage est un risque qu’il faut mesurer pour ne pas qu’il fasse insulte.

Et en parlant de concert, justement, un jour, dans une rue de Bordeaux, je remarquai certaine affiche, qui citait, devinez un peu : John MAYALL. Et j’étais là, à temps ! Le cadeau...
Les jours, je les ai comptés, les heures ont passé vite. J’étais bien tôt pour entrer dans la salle, bien avant la queue que je craignais. Et là j’y suis, en première ligne, tout près du piano électrique, et j’attends, entre patience et impatience, avec la ferveur d’un adolescent.
Et je vois arriver un homme grand à la belle ligne, en marcel blanc, cheveux ondulés mi-longs, avec ses musiciens, qu’il citera à un moment : Freddy Robinson, guitar, Blue Mitchell, trumpet. Clifford Solomon, sax. Larry Taylor, bass (le vieux compagnon, ex-bassiste de Canned Heat ), Ron Selico, drums.
Et, charme supplémentaire, je la connaissais par « The Turning Point », sa voix parlée. Toute filant vers la clarté, voix glissante sur langue d’étoiles. Alors, cette présentation était encore une chanson.
Un groupe qu’il avait formé en vue de marier blues et jazz, et qui donna lieu à l’album « Jazz Blues Fusion ». Sous mes oreilles écarquillées, oui, et mes yeux dilatés, Mayall chantait de sa voix un peu aigrelette à l’époque, avec cet arrière-plan nasal, égrenant ses notes au piano, soufflant précis dans ses harmonicas, qu’il engageait dans ce magnifique porte-harmonica en bois massif, celui qu’il s’était fait fabriquer. Bien sûr, mes regards vont aussi aux autres membres, Freddy Robinson. De ses chapelets de notes, qu’il insère entre deux phrases chantées comme c’est typique en blues, s’échappe une allégresse tranquille, une clarté de fontaine. On est loin des guitares hurlantes et saturées. Sa Gibson 335 est douce entre ses doigts, ses solos sont plutôt cristallins, ses démanchés fluides.
Enfin, tout avance tel un navire qui chaloupe sans forcer, Mayall est très expressif, plisse des yeux, les tient clos, je ne perds pas une seconde entre l’écoute et le regard, et je me dis déjà que la force d’emmener une tournée de six musiciens en Europe est admirable. Mais Mayall est un passionné, un envoûté discret du blues.

Cette force, il l’a gardée jusqu’à ce que la maladie tenue secrète, ou la faiblesse du corps vieilli, ne l’en prive. Il ne voulait pas rester chez lui, il a fait des duos, invité Steve Miller, Gary Moore, et sur chaque vidéo qu’il m’ait été de visionner, je voyais mon idole ayant changé d’âge, mais tout aussi vif, et ce qu’il avait perdu en vigueur, il le gagnait en générosité. A demi penché sur son clavier, il souriait, et ce que l’on pouvait sentir, c’était la joie de jouer, cette jubilation qui le signait, et il frétillait encore avec ses harmonicas. Et se tournait vers ses comparses, pour les féliciter de leurs solos. C’est fête ici, semblait-il dire. Et Mayall le boss préférait se faire le grand frère, tout en restant maître du jeu.
Oui, cette passion de la scène l’a porté et emmené au plus loin, le blues l’a nourri comme il l’a nourri et rénové, en l’ouvrant sur de nouvelles sonorités, et ce qu’il a fait dès Bare Wires, produire deux albums Bare Wires et Blues from Laurel Canyon qui sont des suites, sans silence entre les plages, des albums-concepts comme on disait à l’époque, en blues, il fut le seul à le faire, à ma connaissance du moins. Peut-être alors si l’on voulait parler de ces albums, auquel j’ajoute au moins The Turning Point, pourrait-on dire que Mayall a été le créateur du progressive blues, avec ce goût de la liberté d’inclure dans la musique le bruit de ce décollage d’avion dans « Vacation » qui ouvre Blues from Laurel Canyon, autre disque dont il a peint la pochette et où il se montre contemplatif, tranquillement au monde, apaisé et même apaisant dans cette verdure luxuriante où il baigne en sécurité.
*

Ce 22 juillet 2024, John Mayall n’a pas réussi à vaincre le destin humain. Mais durant plus de 70 ans, il a enchanté auditeurs et musiciens, révélé de nombreux talents. Et, que ce soit en Angleterre ou aux States, il a connu tout et tous de ce monde dédié au blues. Qu’il ait fait un détour par une musique plus funk à la fin des 70s a fini par m’éloigner, pour un temps, je n’achetais plus tous ses disques comme je l’avais fait durant dix ans. Mais, pas plus que ceux qui aiment n’oublient leur premier amour, ceux des artistes que l’on chérit, et qui nous font sentir vivants et comme la vie est forte quand on la célèbre, ceux-là on ne les lâche jamais. Ils battent encore des ailes au fond de nos chairs.
Sa musique, donc, elle est passée des reprises à la création originale, ses textes de la tradition à la rénovation, l’ouverture sur la joie : guilleret, il chante ses amours autant que, d’une mélancolie dominée, il se décrit comme un perdant (« Don’t Kick Me »), ou encore comme un amoureux acceptant son pauvre sort de second prétendant pour sauver la chance d’un amour (« Thoughts About Roxane »).
Et, bien avant d’autres, il s’inquiète de la Nature que nous faisons tant pâtir de nos immondices. Chanter « Nature’s Disappearing » en 1970, c’était être en avance sur le temps. L’homme veillait sur tout. Mayall était un humain. Parmi les humains.
Politiquement, ce n’était pas un révolutionnaire, mais je crois qu’il était malin et prêt à de bonnes réformes. Simplement, ce bon changement pour plus de liberté, il ne l’aurait pas fait en dehors des clous. Patience et méthode. Mais il cite Lenny Bruce. Il n’était pas conservateur, je crois. Écoutez « The Laws Must Change » et vous devinerez. Après tout c’était lui le parolier.

Je pense à toi, John, je te regarde et te remercie, où que tu sois. J’ai bien des regrets, dont celui un peu puéril de ne pas t’avoir apporté ma cartouchière de Blues Harp pour que tu la signes lorsque je suis allé te voir à Brest. Je n’y avais pas pensé. Sans doute devais-je considérer qu’il s’agissait de quitter le stade de fan.
Mais je t’ai suivi, comme je pouvais, sur les réseaux, et je t’ai vu vieillir, te courber un peu plus, porter des lunettes, et je vieillissais avec toi, sans me voir, le temps n’épargne personne, mais toi tu as joué avec lui, et il ne s’est pas joué de toi. A l’instar de millions d’admirateurs, j’aurais aimé te voir vivre plus longtemps. Ta musique était une armure, elle t’aura protégé de biens des maux.

Oui, je pense à toi, à tout ce que ta découverte m’a permis de réaliser, à ce désir de jouer qui m’a poussé jusqu’à la scène entre 1976 et 1979.
Et je pense à ma compagne, chère Nelly, qui m’a si bien accompagné sur ce chemin d’amour fou que je ne priverai pas de l’anecdote qui suit.
Un jour, surprise dans mon courrier : une organisation m’envoie une invitation pour deux personnes dans une station de ski, séjour et tout compris, en échange d’un concert. Je n’avais pas beaucoup de métier, je n’étais pas assez sûr de moi pour jouer seul.
Alors on est parti Nelly et moi dans la vieille 4L direction Les Alpes, Les Karellis. On a quand-même acheté un pain de deux kilos, il nous a tenu toute la semaine, jusqu’au retour. Arrivés là-bas , on nous attendait. On a fait connaissance. Ils étaient d’une gentillesse qui souriait.
Ils m’ont même demandé si j’étais d’accord pour faire une interview à la radio. Je me sentais honoré, choyé comme jamais.
Le jour du concert, pour un morceau ou deux, j’avais besoin d’un soutien rythmique. Par chance, ma douce avait fini par accepter, oh ! oui, pour moi, pour le blues aussi : elle est entrée sur la scène, avec ce mélange de trac et d’humilité, et elle a joué, sur la basse demi-caisse Epiphone que j’avais amenée, dos au public mais elle l’a fait, et ce soir-là, le blues a tinté encore, à ma petite manière, avec mes humbles moyens, et ce chemin-là, il m’avait pris un certain temps. Il avait été barré tout jeune, tel un œuf mis au rebut.
Car la scène, ça demande un certain niveau, une présence aussi, et je n’avais je crois ni l’un ni l’autre, du moins comme je l’aurais souhaité, pour que ça continue et bien, et puis j’étais trop seul. Mais le public exigeait moins, surtout à cette époque.

J’ai raconté pas mal de choses. Parlé de moi, certains peut-être penseront, trop, et pas assez de Mayall. Mais si je l’ai fait, c’est que nos vie se sont entrecroisées, enfin, par disques interposés. Je ne suis pas journaliste rock, même si ça ne m’aurait pas déplu, loin de là.
Je voulais juste aussi vous faire sentir la trajectoire d’un fan chez lequel l’admiration provoque une accélération du désir, avec la certitude que c’est par la musique que l’on peut se tirer du magma des chagrins et des ratages de l’existence. Et en particulier par le blues.
Ce blues, je lai chanté, et je le chante et chanterai encore, seul et en compagnie. Celui des écorchés, des mélancoliques et des utopistes aussi.
Et si je peux le faire, ce sera grâce à toi, John Mayall, que je remercie aussi pour avoir révélé Peter Green le grand aux arabesques inspirées et à la mélopée ouatée. Lui aussi ce soir-là dans l’auditirium des Karellis, nous l’avons joué et je l’ai chanté. Cet « Out of Reach », je le jouerai encore, parce que voyez-vous : ça reste ma vie ici.

Me reste donc ta voix, John, si douce et chaude quand tu parlais en présentant tes musiciens. Tes disques, vinyles, et CD. Et puis au fond de moi, toute cette mémoire que ton départ a fait surgir.
And so, wherever you might be, I tell you, I won’t let you vanish. You’re just laid to rest down there, but your bluesy mind gotta fly away, far away along the sky or over the seven seas.
And maybe I’m gonna fight for you. Your passing make so many cry. But everyone looks at you as a great artist and wonderful person.

I’m gonna play your records, next days. And all year long.

But now I feel I gotta shut up : you’re resting. Have a pleasant trip up to liberty. Now you’re ready to ride another great misterious horse.

Thanks, John, so long.

Pier-Mayer-Dantec
25 au 27 juillet 2024
jean-marie Fouilleul n°425,448,500
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bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

Bon ça va faire une petite digression, mais puisqu'on (Pier Dantec Mayer) a parlé de Fleetwood Mac - à propose de Peter Green, un des guitaristes du Mayall des débuts -; est-ce qu'on peut m'expliquer le nom du groupe. Il est dit que Peter Green l'avait fondé avec le bassiste John Mac Vie : mais ? John Mc Vie doit donc être le mari de Chris Mc Vie (?) qui fut chanteuse du groupe ? Et Mike Fleetwood doit être le batteur du groupe (??). Et le nom serait une contraction de ceux de Mike Fleetwood et John Mc Vie alors, sans qu'apparaisse celui de Peter Green (???) pourtant fondateur du groupe avec John Mac Vie ? Voilà un groupe (que je connais très peu) qui parait ressemble un peu à un sac de nœuds en l'état 8, mais dont la genèse m'intéresse. Merci pour vos lumières éruditdsdurock, si vous m'entendez...

Et reviendrons-en à ce bon vieux John Mayall... :wink:
Remi Preuller
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Re: John Mayall

Message par Remi Preuller »

Salut bernie,
Je n'en sais pas plus que toi sur l'origine du nom Fleetwood Mac et ce groupe ne m'a intéressé qu'au temps du regretté Peter G.
Je ne suis pas sûr cependant que le Mac du nom soit McVie puisqu'ils ont d'abord eu un autre bassiste avant lui :roll:
L'absence de Green dans le nom, par contre, est probablement due à sa réticence devant la notoriété et le statut de star.
Il aurait aimé vivre caché et anonyme, ce qui est un peu incompatible avec le métier qu'il avait choisi mais c'était là, hélas, le moindre de ses soucis existentiels !
Pour ce qui est du "billet" transmis par rémi, j'avoue, je ne l'ai pas lu, trop long :oops:
bernie
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Re: John Mayall

Message par bernie »

:D
J'en ai lu quelques bouts pour ma part, cherchant ce qui m'y aurait intéressé, sans avoir eu assez de patience jusqu'ici...Les considérations autobiographiques noient trop longtemps le cœur du sujet semble-t-il...

Cela dit, Jacques Mayol et Le Grand Bleu, John Mayall et le Grand Blues (grand du blues ?), y aurait-il un rapport, (vous avez 3 heures....) :shock: :wink:
Remi Preuller
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Re: John Mayall

Message par Remi Preuller »

Très bon ça, bernie ! :lol:
De mon côté je me demande ce que vont devenir les guitares hardiment customisées de John Mayall...
Et ses autres instruments !
Espérons que ce ne sera pas comme les outils de travail de notre regretté Jean-Louis Murat national, déjà dispersés aux enchères...

Mais le blues a son propre Hall of Fame je crois ?
Gageons qu'ils conserveront la collection...
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